• [Critique] Délivre-nous du mal


    Le sergent de police Ralph Sarchie a un don assez unique, celui de pressentir le « potentiel » de certaines enquêtes. Lorsqu’une femme jette son bébé dans la fosse aux lions au Zoo du Bronx et qu’un mystérieux individu encapuchonné s’enfuit des lieux de l’incident, Ralph tombe dans une spirale d’horreurs qu’il n’aurait pas soupçonnées. Confronté à ce qui semble être la possession de Jane Crenna, la mère de l’enfant en question, il trouve une aide inattendue en la personne de Mendoza, un prêtre aux manières peu usuelles et au passé trouble. Reste aux deux hommes à vaincre le mal, celui des origines, qui s’insinue lentement dans les rues de New-York, dans le sillage de trois anciens Marines...


    Avec sa bande-annonce léchée, Délivre-nous du mal a de quoi appâter les fans de films d’horreur. Aux commandes, un habitué de la chose avec Scott Derrickson, un réalisateur à qui l’on doit le sympathique Sinister... ainsi que le très moyen L’Exorcisme d’Emily Rose. Pourtant, il faut bien se pencher sur son dernier film car, outre l’amour qu’il semble porter au genre horrifique, le monsieur sera bientôt à la tête du prochain opus Marvel : Docteur Strange. En attendant, il convie le trop rare Eric Bana à un petit tour dans les rues poisseuses du Bronx entre exorcisme, satanisme et autres joyeusetés démoniaques. Pas sûr que l’originalité soit au rendez-vous...

    Comme tous les films d’horreurs de ces dernières années, le métrage s’ouvre sur le panneau « Inspiré de faits réels ». Bon, ça commence mal. On découvre alors rapidement une petite histoire bien effrayante qui mêle joyeusement la guerre en Irak, l’occulte et surtout l’exorcisme, un thème qui semble définitivement fasciner Derrickson. Si l’intrigue suit un cheminement plus ou moins convaincant, on s’aperçoit rapidement qu’elle accumule à peu près tous les clichés inhérents à ce type de film. D’abord, le flic intègre mais pas trop, qui aime à son temps perdu tabasser du pédophile – ce qui est bon pour la santé à croire -, ensuite le prêtre très très mystérieux qui fait aussi prêtre que Luc Besson fait réalisateur, et surtout les méchants démons forcément à comploter pour envahir la terre de partout. Alors heureusement, avec tous ces clichés, Derrickson bricole tout de même un scénario assez prenant et arrive facilement à susciter l’intérêt grâce à une réalisation correcte et quelques moments bien flippants. Mais voilà, l’esthétisme ne suffit pas.

    Le souci majeur de Délivre-nous du mal c’est qu’il n’y a qu’Eric Bana d’intéressant. Et encore... Son personnage enquille aussi joyeusement les clichés comme on l’a déjà dit. Les retournements de situation se prévoient à dix kilomètres – « Tiens, le prête et le sergent font équipe ? Bon ben on va pouvoir buter l’ancien coéquipier »... ou encore « Oh, mais il a une fille et une femme le héros ! Allez, on va les kidnapper/torturer/violer » (rayez la mention inutile)  et pire encore, des incohérences et invraisemblances crèvent l’écran au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue. Au premier rang de celles-ci, on trouve le fameux syndrome Dracula du film d’horreur : tout, ou presque, se passe de nuit. A croire que dans cette partie des Etats-Unis, on a opté pour le 20h de nuit, 4h de jour. C’est plus utile pour les forces démoniaques, c’est bien connu. Le meilleur exemple de ce syndrome : le sergent qui prend une affaire de sous-sol louche à aller inspecter – oui, ça part déjà mal – avec lorsqu’il sort un grand soleil. Coupure... et arrivée à la maison en question en pleine nuit et en pleine tempête – oui parce que le film se passe aussi pendant la moitié du temps sous la pluie. Soit c’était très, mais alors très très loin, soit la nuit tombe avec une vitesse insoupçonnée dans le Bronx. Ce genre de détail, qui semble infime comme ça, décrédibilise tout le film. Sans parler du méchant qui copie totalement le look de celui de Blade II pendant les trois quarts du métrage.

    De même, dès le départ, on sent que la famille de Ralph sera un des enjeux finaux et on est obligé de se farcir une bonne vieille intrigue parallèle à base de « T’es pas assez à la maison », « Mais non je t’aime »,  « Ta fille a besoin de toi », « Et moi, j’ai besoin d’une pute » (enfin dans les grandes lignes quoi). Non seulement on se fout de la chose mais en plus on sent que tout est artificiellement gonflé. Là où la famille de Sinister se justifiait totalement (c’est même le cœur du film), celle de Délivre-Nous du Mal fait pièce rapportée. On passera rapidement également sur cette idée monstrueusement débile d’inclure une chanson des Doors (mais vraiment l’idée la plus débile du siècle) pour terminer sur le morceau de bravoure du film, l’exorcisme. Plutôt bien filmé, tendu et assez effrayant, c’est un des seuls bons éléments qui sauvent le long-métrage (en faisant abstraction de The Doors... encore). Cependant, arrivé à la conclusion bien, mais alors bien bien bien puritaine, on a un sentiment très étrange et extrêmement dérangeant : avoir assisté à un spot publicitaire de deux heures sur la religion catholique style « Devenez exorciste, on a des enfa...euh des cookies ! ». Un coup à rendre le film nauséabond, et pas qu’un peu.

    Délivre-Nous du mal est une mauvaise surprise. Même si on le prend comme un film d’horreur de série B, même si Eric Bana porte tout le film sur ses épaules et même si l’ambiance reste assez soignée, il y a bien quelque chose de dérangeant dans le message du film et dans le nombre de clichés qu’il régurgite à longueur de temps. Une grosse déception qui incite surtout à se contenter de la vision de Sinister, autrement plus sympathique. Du coup, pour Docteur Strange, on peut légitimement s’inquiéter...

    Note : 4/10

    Meilleure scène : L’exorcisme final

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