Y tu mamá también (Alfonso Cuarón - 2001)


Avec Gravity, son dernier film champion du buzz, Alfonso Cuarón, un Oscar en poche, a été adoubé par le box-office. Cette attraction sensorielle incroyable un peu creuse failli faire oublier son dernier film Les Fils de l'Homme, plus abouti narrativement et, à mon avis, plus impressionnant visuellement car plus ancré dans une imagerie réaliste. Son aventure américaine avait d'abord commencé par Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban. Appelé pour prendre la relève de Chris Colombus, Cuarón réalisa le film le plus "différent" et le plus apprécié de la saga notamment car c'est celui avec le plus de style. Le Mexicain modifia radicalement l'esthétique établi dans les premiers films (fini les costumes, un Poudlard gothique) et amena les aventures du héros vers un terrain plus mature. Le tout couronné d'une magnifique photographie, de vraies fulgurances de mise en scène (de beaux plans-séquences), d'un John Williams qui tente des trucs (The Knight Bus) et d'une intrigue savoureuse aux rebondissements temporels.

Mais revenons en 2001, avant son départ aux États-Unis, pour le film qui le révéla, Y tu mamá también. Le film raconte le voyage initiatique de Julio et Tenoch, deux amis inséparables accompagnés par Luisa, tous trois partis en direction d'une plage imaginaire. On retrouve déjà la patte visuelle qui fera la célébrité de Cuarón par une multitude de plans-séquences et une certaine composition de l'espace. La forme est donc audacieuse et techniquement relevée mais donne l'impression d'être réalisée sans forcer, grâce au rendu brut de la caméra portée. La forme contribue à accroître un sentiment de réalisme grandement diffusé par les personnages qui paraissent authentiques. En effet, Y tu mama tambien est un des films qui décrit le mieux l'amitié car son étude du thème ne semble pas idéalisée. Cuarón montre la complicité qui découle de la relation tout comme il montre la fragilité et la finitude de cette dernière. Sa description touche juste et permet à chacun de se reconnaître dans l'amitié entre ces personnages d'ado insouciants parfaitement joués par les deux acteurs, Gael García Bernal et Diego Luna. Le film peut paraître frivole par son cocktail sea, sex & drugs or il transpire en hors-champ une vision sans concession de la vie et des effets du temps... Le film de Cuarón semble pouvoir se lire donc comme une odyssée hédoniste, une invitation à jouir de la vie.
Beaucoup de style, des personnages très attachants pour une peinture magnifiquement juste de l'amitié : ce road-movie cru qui respire la vie est un vrai coup de maître. Cela ferait beaucoup de bien à M. Cuarón de revenir à de tels histoires à hauteur d'hommes au lieu de se complaire dans une virtuosité formelle, l'expérience Gravity se réduisant malheureusement à une claque visuelle...  périssable, par essence.

Valou

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