Beaucoup de Parisiens ignorent qui est Nicolas Miguet. Depuis des années des affiches racoleuses à sa propre gloire s'étalent le long des portes du boulevard périphérique. Que sait-on de lui en dehors d'un nom, d'un visage et d'une pensée subtilement orientée vers le rétablissement des finances publiques avec des slogans tels que "Moins d'impôts maintenant" ou "Miguet c'est urgent"? On ne dit pas assez, par exemple, que ces affiches placardées sont le fait non de militants acquis à sa cause mais de personnels dument rémunérés pour cette tâche.
Affairiste en affaires et poujadiste en politique, Miguet mélange au gré de ses intérêts chacune de ces deux activités, comme lorsqu'il tenta de reprendre pour une bouchée de pain le fichier des abonnés du journal Minute en dépôt de bilan. Pour qui s'y intéresse, le parcours de Miguet offre au surplus un vaste éventail de condamnations, de la diffamation à la fraude fiscale en passant par le manquement aux règles des marchés financiers dont il s'érige pourtant en expert. On relèvera avec intérêt que cet homme qui semble convaincu de détenir le secret du rétablissement des comptes de la nation a eu interdiction de gérer ne serait-ce que sa propre entreprise.
La "carrière" politique de l'intéressé qui n'avait jusqu'alors connu comme seuls éclats, que des tentatives avortées de candidature à l'élection présidentielle est en train de prendre un tour nouveau. Miguet se radicalise en surfant sur la dynamique "anti-système" en même temps qu'il s'institutionnalise grâce à un soutien massif apporté à la campagne de l'UMP à la Mairie de Paris.
La campagne "Hollande dégage" semble être l'aboutissement de son oeuvre. Elle a servi de mascotte au fourre-tout idéologique "Jour de colère" qui a donné lieu le 26 janvier dernier à un véritable raout antisémite, raciste et homophobe dans lequel les amis de Dieudonné ont pu crier aux côtés de ceux de Miguet, "Juif, la France n'est pas à toi", dans les rues de Paris.
Un concept emprunté au droit boursier, dont Miguet à force de boursicotages est devenu familier, décrit bien les relations étroites entre la droite parisienne et l'homme d'affaires: l'action de concert. Prétendument indépendants et situés aux antipodes, ils agissent en fait ensemble et dans le même but. Une chose est certaine, il y a là une alliance objective davantage qu'un échange d'amabilités.
Les exemples sont légion. D'abord, Nicolas Miguet ne perd jamais une occasion d'afficher sa proximité à la députée de l'Essonne qui a bien du mal à mobiliser des soutiens.
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En retour, cette dernière a été l'invitée d'honneur le 18 janvier du dernier banquet du Rassemblement des Contribuables Français, groupuscule auto promotionnel de Nicolas Miguet.
Nicolas Miguet, ne fait jamais les choses à moitié. Pour lui, soutenir un candidat, c'est salir son adversaire. Des caricatures d'Anne Hidalgo siglées Nicolas Miguet sont donc placardées sauvagement toutes les nuits sur les murs de la capitale. L'affichage est massif donc très onéreux.
Tout à son entreprise d'animation d'une "bad campaign", l'homme d'affaires semble s'être fixé pour seule règle de n'en avoir aucune. Il a été jusqu'à traiter Enrico Macias sur Twitter de "poubelle parisienne" ramassée par Anne Hidalgo. L'intéressé appréciera.
On imagine bien les raisons pour lesquelles Madame Kosciusko-Morizet a été chercher des supplétifs pour tenter de ressusciter une campagne moribonde. Mais à quel prix? Car cette mésalliance, soigneusement dissimulée, a nécessairement des contreparties dont les Parisiens comme les partenaires politiques de Madame Kosciusko-Morizet, au premier rang desquels le Modem, ne savent rien. Celles-ci doivent être d'autant plus élevées que la campagne est aux abois et que Nicolas Miguet ne dépense jamais son argent sans attendre un retour sur son investissement.
Nathalie Kosciusko-Morizet devra assumer le coût moral, politique et financier de ces tumultueuses fiançailles. Quels qu'en aient été les soubassements, un tel arrangement en pleine campagne électorale heurte les consciences autant que les usages. Tout se passe comme si la droite parisienne tentait au moyen d'un pacte infamant de se sauver d'une défaite possible au prix d'un naufrage certain.