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LA RUSE

1943 – Les Alliés sont résolus à briser la mainmise d’Hitler sur l’Europe occupée et envisagent un débarquement en Sicile. Mais ils se retrouvent face à un défi inextricable car il s’agit de protéger les troupes contre un massacre quasi assuré. Deux brillants officiers du renseignement britannique, Ewen Montagu et Charles Cholmondeley, sont chargés de mettre au point la plus improbable – et ingénieuse – propagande de guerre… qui s’appuie sur l’utilisation du cadavre d’un agent secret ! 

CRITIQUE DU FILM

L’adage selon lequel un bon sujet ne fait pas forcément un bon film trouve sa justification régulièrement sur nos écrans, en cette époque de profusion d’images et de trop-plein de formats proposés à des spectateurs croulant sous l’offre et peinant à séparer le bon grain de l’ivraie. 

Connu grâce au succès mondial aux sept Oscars de Shakespeare in love (1998), et de retour notamment en 2016 avec Miss Sloane, le réalisateur britannique John Madden nous livre un film d’espionnage qui mêle la grande Histoire à la petite. Dans La Ruse (dont le titre original, Operation Mincemeat, est plus intriguant), il est tout d’abord question d’aborder un épisode réel de la Seconde Guerre mondiale ayant déjà fait l’objet d’une adaptation au cinéma en 1956 dans L’Homme qui n’a jamais existé. Une histoire dont on ne dévoilera pas les détails ici mais qui a fasciné beaucoup de monde, notamment Alfred Hitchcock et son scénariste Ernest Lehman, lequel s’en est inspiré pour écrire La Mort aux trousses (1959).

La Ruse s’inscrit ainsi dans la longue lignée du film d’espionnage, dont le roman de l’auteur écossais John Buchan Les Trente-neuf marches, paru en 1915, constitue l’un des prototypes. Le risque de raconter une histoire vraie est de se priver potentiellement de l’élément de suspens, et donc d’une bonne partie de son intérêt. Gageons toutefois qu’une part indéterminée des spectateurs ne seront pas familiers de cette histoire et découvriront un des épisodes les plus rocambolesques de la Seconde Guerre mondiale. Servi par une réalisation certes impersonnelle mais efficace, et par de bons acteurs, notamment Colin Firth, Kelly Macdonald et Matthew Macfadyen, La Ruse éveille notre intérêt quand il se plonge dans les détails de la préparation de l’opération et de son exécution. C’est moins le cas quand il se croit obligé de développer la sous-intrigue d’un triangle amoureux afin de pimenter le tout et de faire en sorte que l’on s’attache davantage aux personnages.

La ruse

Reste toutefois un spectacle solide et bien mené, dans lequel on s’amuse à démêler les liens avec une autre figure essentielle du monde fictif de l’espionnage : James Bond. En effet, avant de donner naissance au fameux agent 007, Ian Fleming a été lieutenant puis lieutenant-commandeur du renseignement naval dans l’armée britannique pendant la guerre, et il joue un rôle important dans La Ruse (incarné par Johnny Flynn), car il serait l’auteur du fameux « mémo de la truite », un document qui listait 54 façons de tromper l’ennemi, comme le poisson, et dont la 28e serait à la base de l’opération Mincemeat.

IRONIE

Si l’ironie qui consiste à utiliser un mort pour sauver des vies donne toute sa saveur à La Ruse, on déplorera toutefois l’ajout de cette intrigue fleur bleue qui alourdit le propos et perpétue les stéréotypes de genre, ainsi qu’un montage par trop lâche laissant s’installer des baisses de rythme. Malgré ces réserves, le film convainc par son réalisme et la solidité du jeu de ses comédiens (et accessoirement par la musique de Thomas Newman). Il permet aussi de lever le voile (une nouvelle fois) sur le travail mené dans l’ombre par une poignée d’hommes (les femmes restant à la périphérie) dont l’ingéniosité et le culot ont permis de monter une des opérations les plus risquées et alambiquées de la dernière guerre. On ne boudera pas notre plaisir devant un spectacle intelligent et instructif.

Bande-annonce




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