Et soudain, le conflit des conseillers clientèle de Canal+ s’est invité en pleine télé-Bolloré. Non, ce n’était pas le fait de l’Insoumise Raquel Garrido dans l’émission de Thierry Ardisson sur C8, où elle a désormais son rond de serviette pour dénoncer les conditions de travail des employés de Deliveroo, par exemple, mais pas, c’est étrange, de Vincent Bolloré. C’était jeudi 5 octobre, chez William Leymergie et à son corps défendant. Ce jeudi, une heure durant, les salariés ont fait hululer les mégaphones sous les fenêtres pourtant insonorisées du studio de William à midi – c’est le nom de son rendez-vous du midi diffusé en direct sur C8 depuis la rentrée – et réussi à faire entendre leur colère, aussi lancinante que leurs sirènes, dans l’émission. Qui, ça tombe bien, abordait la question du bonheur au travail avec ce top 3 : « une augmentation de salaire », « une reconnaissance de la hiérarchie », « des perspectives d’évolution pro ».
Un mois. Ça fait un mois pile, ce vendredi, que les salariés des deux Centres de relations clients (CRC) de Canal+ abandonnent, chaque jour ou presque et parfois plusieurs fois par jour, leurs marguerites, du nom de la disposition de leurs bureaux d’où ils réceptionnent les appels des abonnés, et descendent en bas de leur immeuble pour faire grève. L’un des deux CRC est à Rennes où se négocie « la flex », le bien nommé plan destiné à introduire encore plus de flexibilité dans le boulot ; l’autre est à Saint-Denis, où on ne négocie plus grand-chose sinon des indemnités de départ : ce centre-là va fermer, 153 postes supprimés, un plan social. Il n’y aura alors plus qu’un seul centre « à forte valeur ajoutée » ou « d’excellence », comme on dit dans le sabir interne. À Canal+, longtemps, on a chouchouté les abonnés avec un service clientèle qualifié, puis, peu à peu, le groupe s’est tourné vers des prestataires extérieurs au Maroc ou encore en Côte d’Ivoire, qui traitent le tout venant des appels. Restaient Saint-Denis et Rennes « à forte valeur ajoutée », donc, puisqu’ils s’occupent de retenir les abonnés qui veulent résilier, ceux qui ont des soucis récurrents ou des problèmes techniques et aussi des « grands comptes » et autres VIP. Tiens, à propos de VIP, ceux de la maison-mère de Canal+, Vivendi – les « cofounders », comme on appelle ici les grands dirigeants de la boîte –, étaient cette semaine en séminaire à Rome, loin de ce genre de petits tracas.