Claude Weill - Ni père ni mère

CHRONIQUE. L'amendement visant à supprimer les mentions « père » et « mère » au profit de « parent 1 » et « parent 2 » dans les formulaires scolaires fait bondir le journaliste.

Par Claude Weill *

Les mentions « père » et « mère » vont-elles être remplacées dans les formulaires administratifs soumis à l'école par « parent 1 » et « parent 2 » ?

Les mentions « père » et « mère » vont-elles être remplacées dans les formulaires administratifs soumis à l'école par « parent 1 » et « parent 2 » ?

Temps de lecture : 3 min

Une fois n'est pas coutume, le chroniqueur se trouve ici d'accord avec la Manif pour tous et tout ce que la France compte d'adversaires du mariage gay pour estimer que remplacer « père » et « mère » dans les formulaires scolaires par « parent 1 » et « parent 2 » est une sottise idéologique.

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Il s'agit, si l'on en croit les auteurs de cet amendement voté par les députés contre l'avis de Jean-Michel Blanquer, d'« ancrer dans la législation la diversité familiale des enfants dans les formulaires administratifs soumis à l'école » (Valérie Petit, LREM). Et encore, de prendre en compte l'embarras des familles « qui se retrouvent face à des cases figées dans des modèles sociaux et familiaux un peu dépassés » (Jennifer de Temmerman, LREM). On voit l'idée.

Oh, il y a des choses plus graves. Inutile de convoquer Freud et Lévi-Strauss. Ni l'ordre anthropologique ni la civilisation ne sont menacés.

La solution ne présente à peu près que des inconvénients

Mais outre que cette question, d'ordre purement administratif, relève (devrait relever) d'une simple circulaire et non de la loi, la solution retenue, aussi inélégante (parent 1 et 2 sent par trop le jargon bureaucratique en usage dans les démocraties populaires ou dans les romans de science-fiction) qu'involontairement humoristique (on imagine la scène : « Bonjour, parent 1 – Bonjour, parent 2 – Ah non, vous vous trompez ! Moi, je suis parent 1 – Oh, pardon ! Au temps pour moi »), la solution, dis-je, ne présente à peu près que des inconvénients.

Loin de leur river le clou, elle donne rétrospectivement raison à ceux qui prophétisaient, dès 2012, que le mariage pour tous aboutirait à faire disparaître les termes « père » et « mère » des documents administratifs. Telle Marine Le Pen qui déclarait le 9 novembre : « Moi, je suis une maman aussi. Et moi, je n'ai pas envie que demain, à l'école, plutôt que le nom du père et le nom de la mère, il y ait marqué parent 1, parent 2. » Mensonge, fantasme ! s'écrièrent en chœur les défenseurs de la loi Taubira. Ils se trompaient. Le fantasme est en passe de se réaliser. Et pas besoin d'avoir fait de longues études de psychologie pour deviner que beaucoup de mamans (et de papas) n'ont pas plus envie que Marine Le Pen d'être réduites à un numéro.

Sous le couvert d'égalité, on recrée une hiérarchie de fait

Sous prétexte de « dégenrer » la parentalité, on la déshumanise.

Sous le couvert d'égalité, on recrée une hiérarchie de fait dans l'exercice de l'autorité parentale. Car 1 vient toujours avant 2. Ce qui annonce quelques scènes domestiques assez rigolotes :

–    Maman, je mets qui comme parent 1 ?

–    Ben, moi, bien sûr.

–    Le père : Ah bon, et pourquoi pas moi, s'il-te-plaît ?

–    Parce que l'école, c'est moi qui m'en occupe.

–    Oui, mais je suis quand même le père, ici !

–    Le père, oui. Mais le parent 2 !

Et tout ça pour quoi ? Pour rien. Car, en fait, pour « ancrer la diversité familiale » dans les formulaires, l'école n'a pas attendu que le législateur s'en mêle. Ça fait beau temps qu'elle a appris à composer avec les aléas du nouvel ordre familial : les familles sans père, sans mère, les familles à beau-père, à belle-mère, les familles à deux mamans, à deux papas, et autres possibles configurations du Meccano familial contemporain.

Alors, puisque l'affaire est toujours en discussion parlementaire et doit revenir bientôt devant les députés, osons une solution simple et de bon sens qui devrait mettre tout le monde d'accord, les tenants de la famille traditionnelle et les explorateurs du nouveau paysage parental : ne rien mettre du tout. Cela donnerait, par exemple : « Gaëtan Gravelax, fils de… et de… », ou « Lina Gratteloup, fille de… et de… ». Ça tombe bien : c'est déjà ainsi sur la plupart des documents administratifs (extraits de naissance, actes de mariage, etc.). Comme quoi…

* Claude Weill est journaliste et écrivain. Il a notamment dirigé la rédaction du « Nouvel Observateur » de 2011 à 2014.

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Commentaires (101)

  • Mamette80

    Tout simplement pour faire passer ce que la majorité des Français refuse ! Et il faudrait faire confiance à toutes ces manigances ! Chez Lrem, ils doivent nous penser sous hypnose ! Attention au réveil... ...

  • PEP17

    On peut tout craindre d'une assemblée capable de dérives qui ne font que témoigner d'un niveau de conscience bien léger !

  • Vauch

    Comment lutter contre les diktats des minorités ? Par le référendum d'initiative populaire, peut-être ? Sus aux cahiers de doléances !