Nostalgie cinématique : quels symptômes ? Quels traitements ?

23 avril 2018. Je me rends dans un de ces petits cinémas sud americains, dans la charmante ville de Sucre, Bolivie. Donc trois faits sont à présenter. Premièrement, j'ai découvert l'oeuvre dans un format digne d'un de ces vieux téléviseurs sur lesquelles on regardait E.T ou Les Dents de la Mer. Le son en n'était pas meilleur: je tendais l'oreille un peu comme quand l'un de vos écouteurs rendent l'âme et que vous vous efforciez à tenir celle qui continue de fonctionner avec une main. Pas fameux hein, me diriez-vous. Deuxièmement le film était en espagnol, et même si les doublures assuraient plutôt bien leur part du job, mon coeur se laisse toujours attendrir par les voix originales d'ordinaire. Bon eh bien en dépit de tout cela, j'ai adoré 1111. Aaaah oui. J'ai oublié, troisièmement, si je viole les ponctuations et un peu l'orthographe c'est parce que je me retrouve avec un clavier miteux au milieu d'une ruelle bruyante au beau milieu de l'Amérique du Sud. Vous seriez prévenu camarades &&&&"11.


Bon, allons droit au but. Ready Player One est un super film, un bel hommage, une claque visuelle, une performance de plus de la part de S.Spielberg, qui sans aucune modestie, ne se privera pas de montrer ouvertement qui est le patron du divertissement et de la mise en scène de l'imaginaire, de la Science-Fiction et des effets visuels générés par ordinateur [ah pour une fois que je n'utilise pas d'anglicisme]. Et ce, spécialement dans un contexte où les grosses productions sont mises en quarantaine pour subir leur chimiothérapie cinématique à base d'antiobiotiques anti-décors naturels, patchs de motion-capture et reconstructions faciales numériques. Oh je charie un peu, mais mon coeur balance aussi bien du côté des effets spéciaux maisons que des nouvelles prouesses numériques. C'est juste que la brochette Marvel, DC et cie. j'ai du mal à la digérer.


Enfin bref. Tout cela pour dire que tonton Spielberg possède un savoir-faire. Il utilise ses petites recettes traditionnelles de mamie tout en restant a la page. Ces petites compositions musicales surfant tantôt sur un ton humouristique tantôt sur de l'aventure, ce petit groupe de jeunes adolescents ces personnages clichés attachants et ces antagonistes pas trop méchants non plus ? Bon eh bien ca, c'est du Spielby, c'est du divertissement Amblin [ah oui je l'ai dit, dans cet article je minimise les anglicismes, ca papote espagnol tout autour de moi, mon cerveau va saturer].
Tout ceci, se contrebalance avec une utilisation futuriste et innovante des effets visuels. Certains plans séquences numériques sont dignes d'une de ces superbes attractions en dark-ride que vous retrouverez chez notre bon vieux Monsieur Walt. Le cinéaste nous présente finalement une mise en scène très.... Nouvelle, à la mode et complètement adaptée à cette nouvelle génération full-numérique, surconnectée, qui a l'habitude d'interagir avec plusieurs oeuvres en quelques heures grâce a la Culture d'internet, ainsi que plusieurs personnages dans un même film, un même jeu video. 50 ans plus tôt, les parents avaient une TV, regardaient un bon film une fois tous les dimanche et basta. A l'époque dans une oeuvre de Science-Fiction, il y avait un monstre, qu'on ne voyait qu'a la fin qui plus est, et hop. Stop. Terminé. Non de Zeus.


Quoi, vous allez me traiter de nostalgique ?111"""" [ce clavier 11111]. Venons-en au debat. Forcement, touchons au point le plus sensible de l'oeuvre, et veuillez excuser mon titre un tantinet pute-à-clique.
Utiliser souvent comme un péjoratif et régulièrement considéré comme un obstacle à la critique dite objective et argumentée, je considère, moi, la nostalgie comme un super atout pshychologique chez l'Homme, dans les liens qu'il noue et entretient avec l'Art avec un gigantesque A. Forcément que c'est de l'ironie que de parler de symptômes ou bien de traitements. La nostalgie, quand elle n'est pas utilisée comme seule et unique stratégie commerciale et quand elle est utilisée avec intelligence, cest cool ! Spielberg, lui se jette tête la première dans un des plus grands débats du cinema et il fait un beau plongeon. Il reussit car comme toujours il aime travailler avec des contraintes et du challenge ; les anecdotes sont nombreuses pour Jurassic Park et Les Aventuriers de l'arche perdu, elles en sont même inhérentes à la mythologie des oeuvres.


Pourquoi il reussit ? Principalement, parce que Ready Player One est encore une fois, [allez je le cite, comme Jurassic Park], une métaphore fictive et une mise en abime qui nous immerge intensement dans les univers que nous propose Spielberg. Parce que ce realisateur est exactement comme nous, c'est un gros fan boy bien dodus qui fournit un travail monstre pour activer l'une des manifestations psychologiques les plus extasiantes que l'on puisse avoir : le fantasme. En 1993, le fantasme était de voir des dinosaures surréalistes. Aujourd'hui ce serait de plonger dans ses oeuvres préférées pour y croiser King Kong, Rexy ou encore le Cyclope de Ray Harryhaussen ???'11122 [regardez mon pseudo, vous comprendrez]. Donc de fait, Spielberg ne s'investie pas dans ce film uniquement pour les rendements de ce super produit marketing, mais surtout pour exprimer un fantasme. Et pour moi la demarche est sincère puisque les scènes sont extrêmement fonctionnelles. La scène en hommage a The Shining est clairement l'une des meilleurs scènes de cinema qu'il m'a été donné de voir depuis depuis bien 15 ans.


Puis le film est à la fois une oeuvre collective pour ses inombrables références mais aussi une oeuvre extrêmement individuelle car finalement chacun vivra une experience unique, chacun y verrra ce qu'il aura visionné durant ses expériences cinematographiques. Parce qu'ici, on nous montre concrètement que le cinema est temporel et que toutes les oeuvres se voient interconnectées à la manière d'un écosystème. Une oeuvre d'aujourd'hui est forcément un hybride, une forme évoluée de ce qu'a été le cinema d'hier. On ne peut lutter. Spielberg appuie là dessus. Puis dans un contexte où les grosses productions misent sur le recyclage des oeuvres des années 70, 80, 90, Spielberg vient decomplexer la situation, en présentant une véritable hyperbole cinématique, une orgie culturelle frôlant même la porn-pop culture pour enfin gueuler une bonne fois pour toute sur ces modes actuelles de fan-services et de processus de "nostalgisation". Ouais, franchement je pense que Spielberg soit d'une grande franchise avec Ready Player One.


Et ce fantasme dont je parle plus haut, eh bien c'est aussi le mien, car 10 ans plutot en découvrant l'attraction Cinemagic à Disneyland Paris qui propose aux guests de suivre des personnages pénétrant dans plusieurs classiques de cinéma, j'avais imaginé un scénario dans lequel il y aurait tous mes univers préférés.
Bon Ready Player One ne répond pas parfaitement à toute mes attentes en termes de références mais il s'en rapproche. Je ne m'y retrouve pas avec tous ces fan-services envers les jeux-videos certes. Cependant, bravo à l'équipe du film pour avoir su relever ce challenge, celui de proposer une oeuvre avec un échantillon de références pour tout un public, un public avec des personnalités différentes et des vécus différents. Oui parce que il n'y a tout compte fait rien de plus intime et singulier que l'Oasis. Chaque cinéphile possède son éventail de références.


Conclusions. Ready Player One est une réussite, bien que les premières scènes de presentation de l'Oasis sont abjectes selon moi. A la sortie du cinéma, le manque de complexités quant aux enjeux environnementaux et quant au denouement m'a quelque peu deplu. Toutefois, je suis finalement satisfait d'un film en 2018 qui propose une vrai fin avec une morale simpliste mais qui tient une importance capitale. C'est vrai, regardez, même en étant de l'autre côté de la planète pour réaliser un projet solidaire, il a fallu que je regarde ce film, puis que je me connecte pour y écrire une analyse. Toujours connecté, je suis, à l'instar du protagoniste finalement.


Enfin bref. Regardez-le !!! AH tiens , j'ai trouvé le point d'exclañation.

Jordan_Michael
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le 24 avr. 2018

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